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FICHE D'INFO - Financement de l'élevage : les petits pas du Sénégal

Cet article date de plus de 6 ans

L’Etat du Sénégal ne consacre pas encore 30% du budget alloué au secteur agricole à l’élevage, malgré la recommandation formulée en 2003 par l’UA, à l’issue d’une réunion des ministres africains en charge des ressources animales.

Pourquoi cette recommandation?


En 2003, lors du sommet de Maputo, les chefs d’Etat de l’Union africaine (UA) ont validé le Programme détaillé du développement durable de l’agriculture en Afrique.  Chaque Etat s’était engagé à allouer 10% de son budget national au secteur agricole composé de l’agriculture, de la pêche, de  l’élevage et de l’environnement.

L’élevage est considéré comme le parent  pauvre des programmes d’investissements réalisés dans le secteur primaire. C'est pourquoi le Bureau interafricain des ressources animales (UA-BIRA), un organe de l’UA convoqua, deux ans plus tard,  la conférence des ministres  africains de l’Elevage.  Recommandation avait été faite aux gouvernements d’allouer 30% du budget du secteur  agricole  au sous-secteur de l’élevage.

L'élevage est le parent pauvre des programmes d'investissement en Afrique. Photo FAO. L'élevage est le parent pauvre des programmes d'investissement en Afrique. Photo FAO.

L’UA-BIRA avait chargé les communautés économiques régionales  de suivre la mise en application de cette recommandation.

Dans le cadre de la mise en œuvre du Cadre harmonisé de suivi-évaluation des politiques publiques, un mécanisme communautaire adopté par l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) encourage l’organisation de revues annuelles des dépenses dans le secteur agricole.

Par ailleurs, sur directive de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), le Sénégal est en train de formuler la phase 2 du Programme national d’investissements agricoles, une déclinaison du Programme régional d’investissements agricoles de la CEDEAO.

Evaluation officielle du budget


«La part des dépenses allouées à l’élevage, rapportée aux dépenses publiques dans l’Agriculture, n’a jamais dépassé 9% sur la période 2005 à 2013, bien que le Sénégal figure parmi les sept pays africains qui ont réussi à se conformer à la Déclaration de Maputo, sur la même période», mentionne le ministère de l’Elevage et des Productions animales du Sénégal, dans la revue sectorielle produite en 2016.

Africa Check a joint le chef de la Cellule des  études et de la planification du ministère de l’Elevage et des productions animales du Sénégal, Moussa Mbaye. Ce dernier souligne qu’en 2016, «on était à moins 1% du budget national. 30% de 10% des dépenses allouées au secteur agricole équivaut à 3 % du budget national.  Ce n’est pas suffisant».

«Le Sénégal dit qu’il a atteint 10% pour l’Agriculture. Mais quand on pousse l’analyse plus loin, on est à moins de 6% pour l’élevage durant ces dernières années. Toutefois, on a un plan national de développement de l’élevage évalué à plus de 200 milliards de francs CFA. Nous sommes en train de finaliser la Lettre de politique sectorielle. Un Conseil interministériel pour le financement du sous-secteur de l’élevage sera organisé dans les prochains jours », ajoute-t-il.

A combien s’élèvent les dépenses agricoles ?


En 2016, l’Etat du Sénégal a budgétisé plus de 200 milliards de francs CFA pour le secteur agricole. Les parts allouées à chaque sous-secteur sont consignées dans la loi de finances initiale  2016.

 



La part de chaque sous-secteur est exprimée en milliards FCFA.

Pour l’année 2017, le budget 2017 du ministère de l’Elevage et des Productions animales a été arrêté à la somme de  22,3 «  milliards de francs contre 14,9 milliards en 2016. Les ressources allouées enregistrent ainsi une augmentation de 49,45 %.

Que relève l’évaluation du secteur ?


Un document intitulé «Evaluation des processus de Revue conjointe du secteur agricole (RCSA)» révèle que la part des dépenses agricoles dans le budget national a atteint 10% ».

Il est coproduit par le Comité inter-Etats de lutte contre la sécheresse au Sahel (CILSS), la CEDEAO, le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et la Direction de l’analyse des prévisions et des statistiques agricoles du Sénégal.

D’après cette étude, le Sénégal a investi 1.346 milliards de francs dans le secteur agricole. Mais il y a des disparités entre sous-secteur entre 2011 et 2015.


Un sous-secteur important


Le Recensement général de la population, de l’habitat, de l’agriculture et de l’élevage (RGPHAE) réalisé en 2013 par l’ANSD renseigne qu’au Sénégal, on compte 755 532 ménages agricoles.

«Le sous-secteur de l’élevage représente 28,8% du PIB du secteur primaire et revêt une importance capitale sur le plan économique et social pour sa contribution aux revenus des ménages et à la création d’emplois. Il présente un potentiel important en termes de création de richesses avec une contribution au PIB de 4,2% en 2012 contre 4,4% en 2011 ».

Où investir pour soutenir le sous-secteur ?


L'élevage, secteur clé de l'économie sénégalaise. Ici des éleveurs transhumants du Tchad. Photo AFP. L'élevage, secteur clé de l'économie sénégalaise. Ici des éleveurs transhumants du Tchad. Photo AFP.

Selon le docteur Néné Dia, géographe-chercheure en «espaces et sociétés» et sur les «questions liées à l’élevage, la faiblesse des investissements dans les secteurs jugés prioritaires par les  pasteurs influe sur leur résilience face aux aléas climatiques».

Le Docteur Dia ajoute  que «les pasteurs ont du mal à accéder aux aliments de bétail (fabriqués de manière industrielle ou paille de brousse), car leurs prix augmentent surtout dans les zones pastorales marquées par un fort enclavement interne».

«La mortalité des veaux accroît également. Ce qui entraîne une réduction de la production laitière. L’autre conséquence est la diminution du poids du bétail. Tous ces éléments contribuent à la baisse des revenus chez les ménages des pasteurs».

Qu'en est-il dans les autres pays sahéliens ?


L’Association pour la promotion de l’élevage au Sahel et en savane a sollicité l’expertise d’Inter-réseaux,  un think-tank à vocation régionale basé au Burkina Faso, pour  mener une étude sur la prise en charge de ce sous-secteur par les pouvoirs publics. Il a présenté un rapport intitulé « le financement public dans l’élevage au Sahel depuis 10 ans : un double sous-investissement ».

Celui-ci souligne que  «bien que la proportion des dépenses publiques agricoles soit majoritairement à la baisse, on observe une tendance à la hausse concernant la part de l’élevage dans les dépenses agricoles pour tous les pays».

Selon cette étude, «la hausse la plus importante a eu lieu au Mali où elle est passée de 4 % à 18 % des dépenses agricoles entre 2000 et 2010».

Les parts ont progressé de 11 à 23 % au Niger et de 8 à 12 % au Sénégal. Les dépenses ont augmenté de 8 à 13 millions de dollars au Burkina Faso avec toutefois une baisse de la part de l’élevage de 10 à 7 %.

Edité par Assane Diagne

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