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FICHE D'INFO - Sénégal : comprendre le budget 2018

Cet article date de plus de 6 ans

A combien s’élève la part du remboursement de la dette dans le budget du Sénégal voté par l’Assemblé nationale ? Cette fiche d’info apporte la réponse et fait le point sur quelques éléments qui permettent de comprendre le budget.

Instrument officiel de prévision annuelle des recettes et dépenses, le budget 2018 de l’Etat du Sénégal est estimé à 3 709 milliards de francs CFA. Il a augmenté de 10,4% par rapport à  celui de 2017 , si l’on se fie au projet de loi des finances 2018.

«Budget ne signifie pas liquidité»


L’ex-ministre délégué chargé du Budget, Amadou Abdoulaye Sow, a confié à Africa Check qu’en matière de budget, « il s’agit bien de prévisions de recettes, lesquelles peuvent ne pas être atteintes ».

« Le budget d’un Etat n’est pas de l’argent liquide. Les orientations majeures d’un budget sont politiques. Seulement, il faut que la structure du budget respecte la loi organique des finances de 2011 », précise-t-il.

Selon l’Inspecteur du trésor à la retraite, « lorsque les recettes espérées ne sont pas recouvrées, «l’Etat est obligé, au détriment de certains engagements sociaux et investissements, de privilégier parfois le service de la dette ».

Budget ne veut pas dire liquidité, selon an ancien ministre sénégalais. Photo AFP. Budget ne veut pas dire liquidité, selon an ancien ministre sénégalais. Photo AFP.

«Ceci est un engagement pris auprès de créanciers dont le non-respect peut avoir des conséquences sur la crédibilité de l’Etat et sur la dette elle-même comme le paiement d’une pénalité par exemple », a-t-il dit.

« Ce qui fait qu’il faut être prudent par rapport aux promesses liées au budget d’autant qu’il peut survenir un événement inattendu qui nécessiterait une réorientation de certaines dépenses », a-t-il encore averti.

D’après l’ex-ministre du Budget, « c’est la loi de règlement et non pas la loi des finances qui donne les recettes et dépenses annuelles d’un Etat. Mais tout dépendra de la performance des administrations fiscales et du respect des aides budgétaires promis par les pays amis ».

A combien s’élève la dette publique ?


Le projet de loi des finances initiales renseigne que la dette du Sénégal s’élèvera à 5 827, 36 milliards de francs CFA à la fin de décembre 2017, soit 61,44% du Produit intérieur brut (PIB).

Selon le ministère de l’Economie, des Finances et du Plan, concepteur du projet de budget, le stock de dette du Sénégal va atteindre 6 420, 65 milliards de francs CFA en fin 2018, soit un taux de progression de 10, 8% par rapport à 2017.

Le remboursement de cette dette publique est étalé dans le temps. A cet égard, en 2018, le gouvernement du Sénégal envisage de payer « 839, 8 milliards de francs CFA » à ses créanciers, contre 732,49 milliards F CFA en 2017.
Selon la loi des finances, «l’évolution du taux d’endettement s’explique par le refinancement de dettes historiques et au financement d’opérations de trésorerie ».


L’économiste El hadj Mounirou Ndiaye, enseignant à l’Université de Thiès a confié Africa Check que «la dette du Sénégal était à 17% du PIB en 2006. En dix ans, on l’a presque multipliée par quatre ».

«C’est pratiquement le même rythme d’endettement depuis 2006, l’année où le Sénégal a bénéficié d’une remise de dette dans le cadre du programme PPTE (Pays pauvres très endettés)», a-t-il fait observer.

Et le PIB ?


Le Produit intérieur brut (PIB) du Sénégal  est évalué à près 7 500 milliards de francs CFA en 2016 par la Banque mondiale. Ce montant a évolué, à la suite des travaux de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD). En effet, le Projet de rénovation des comptes nationaux  a révélé que le PIB est ressorti à 9 789 milliards FCFA, en hausse de 30%, comparativement à son niveau de 2014 évalué selon l’ancienne base de 1999.

En outre, la Commission des statistiques de l’ONU, organe qui encadre le calcul des PIB des pays membres, a modifié la base de calcul en 2008.

En mars 2017, le directeur général de l’ANSD de l’époque, Ababacar Sadikh Bèye,avait annoncé  l’adoption d’un nouveau référentiel de calcul en 2008.

«C’est ce qui explique le fait qu’on est passé de 7 500 milliards à un PIB de 9 789 milliards, soit une hausse de 30% en dépit de la non-prise en compte des exploitations agricoles dans le recensement. Cela aura un impact sur le niveau d’endettement à la veille de l’élaboration de la phase 2 du PSE [Plan Sénégal émergent]», avait-il expliqué à la RTS, la télévision publique.

Quel rapport dette-PIB ?


L’économiste Souleymane Astou Diagne, maître de conférences à l’ Université Alioune Diop de Bambey, a déclaré à Africa Check que «la dette est un instrument de politique économique».

«La France a une dette qui est égale à son PIB. Les Etats-Unis ont une dette publique qui équivaut à 120% de leur PIB », a-t-il précisé.

L’écart entre le PIB et la dette a incité la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMAO) à adopter un Pacte de convergence, de stabilité, de croissance et de solidarité régulièrement mis à jour.

La dette du Sénégal est-elle soutenable ?


Souleymane Astou Diagne a confié à Africa Check que «le taux d’endettement est de près de 61%. La dette du Sénégal augmente de 4 à 5 % par an, alors que le taux de croissance est entre 6 et 7% ».

«Donc, la richesse nationale augmente plus vite que la dette. Actuellement, le service de la dette annuelle est soutenable par le budget de plus de 3 700 milliards FCFA. Et l’argent emprunté est injecté dans des secteurs porteurs », a dit le Professeur Diagne.

«Ce qui serait dangereux, selon lui, c’est de dépasser la barre des 70% fixée par l’UEMOA et de s’endetter pour assurer des dépenses de fonctionnement ou pour payer de salaires».

L’économiste rappelle que «l’endettement excessif entraine la récession car les agents économiques auront tendance à sortir l’argent du pays et l’Etat va augmenter les taxes et les impôts pour faire face à ses charges ».

Edité par Assane Diagne

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