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Pas de preuves que « huit Sénégalais sur dix souffrent de troubles mentaux »

Cet article date de plus de 4 ans

Dans une interview publiée le 18 juin 2019 par le site Seneweb on lit, dans des propos attribués à Ansoumana Dione, président de l’Association sénégalaise pour le suivi et l’assistance aux malades mentaux (ASSAMM) qu’ « il y a beaucoup de facteurs qui font qu'aujourd'hui, huit Sénégalais sur dix sont confrontés à des problèmes de troubles mentaux ».

Contacté par Africa Check, ce dernier soutient n’avoir jamais utilisé le terme « troubles mentaux ».

« Cela reviendrait à dire que tout le monde est fou », dit-il. Il affirme avoir employé le terme « problème de santé mentale ».

Le président de l'ASSAMM explique que le chiffre qu’il a avancé dans l’interview est tiré d’une étude que son association a faite, sans pour autant mettre à notre disposition, ladite étude.

Faire la différence entre maladie mentale, troubles mentaux et folie


Contrairement aux troubles mentaux qui impliquent « l’existence d’un ensemble de symptômes ou de comportements cliniquement reconnaissables et associés dans la plupart des cas à la détresse et à la perturbation des fonctions personnelles », la maladie elle, « fait directement référence à la médicalisation, aux médecins, aux médicaments… », explique Ibra Diagne, psychiatre au Centre hospitalier national universitaire (CHNU) Fann à Dakar.

« Une maladie peut être un ensemble de troubles », précise Augustin Tine, lui aussi psychiatre, et chef de la division santé mentale au ministère de la Santé publique et de l’Action sociale.

« Avec la schizophrénie, la personne souffre de plusieurs troubles, comme le trouble dissociatif associé à un trouble délirant et/ou associé à un comportement autistique », donne-t-il comme exemple.

S’agissant de la folie, terme très usité, Dr Tine affirme que ce n’est qu’un nom générique. Un langage commun.

« C’est plus de la littérature », dit-il.

Pas de données nationales disponibles


Le Sénégal ne dispose pas encore d’un système d’information fiable sur l’ampleur des problèmes de santé mentale selon Dr Ibra Diagne.

« Il n’y a aucune étude de population effectuée à ce jour au Sénégal pour déterminer la prévalence des maladies mentales », affirme-t-il.

Cependant, des données hospitalières sont disponibles, « mais elles sont relatives », selon le psychiatre.

Du côté du ministère de la Santé et de l’Action sociale, les chiffres avancés par Ansoumana Dione sont réfutés : « le ministère de la Santé n’est pas garant de cette information », soutient Dr Augustin Tine.

Au niveau mondial, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), « près d’une personne sur 10 (souffrait) d’un trouble mental » en 2015.

Les psychoses aiguës premières maladies mentales


Une thèse de doctorat d’état en médecine, intitulée Évaluation des activités de consultation de psychiatrie du CHUN Fann de 2010 à 2015, soutenue en 2017 par Dame Kandji, révèle que les pathologies les plus récurrentes sont les psychoses aiguës avec 32,36 % de bouffée délirante.

Elles sont suivies des états de dépression (12,85 %) et des psychoses chroniques (12,03 % de schizophrénie).

Conclusion : l’affirmation d’Ansoumana Dione n’est pas prouvée


Le site Seneweb a récemment attribué à Ansoumana Dione, président de l'Association sénégalaise pour le suivi et l'assistance aux malades mentaux  les propos selon lesquels « huit Sénégalais sur dix souffrent de troubles mentaux ».

M. Dione précise avoir plutôt parlé de « problème de santé mentale » tout en confirmant le chiffre.

Il déclare que le chiffre en question est tiré d’une étude menée par son association mais n'a pas fourni, à Africa Check, le document en question.

Les psychiatres Augustin Tine, chef de la division, santé mentale au ministère de la Santé et de l’Action sociale et Ibra Diagne du Centre hospitalier national universitaire de Fann soutiennent que le Sénégal ne dispose pas encore de chiffres officiels concernant la santé mentale.

Aucune donnée ne permet donc de confirmer ou d'infirmer le chiffre avancé par Ansoumana Dione.

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